À l’approche de Noël, le centre d’hébergement pour les personnes sans-abri affiche complet
Il règne une douce ambiance de Noël en ce jeudi de décembre au centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) de Betting. Un sapin décoré trône dans un coin du réfectoire. Une dizaine de résidents s'est réunie à l'heure du goûter pour participer à un grand loto. D'autres confectionnent des biscuits. L'atmosphère est joyeuse. On rigole de la pluie qui tombe dehors, bien au chaud derrière les fenêtres. Ce loto de Noël, c'est l'idée de Lucas Infantino, travailleur social au centre depuis un an et demi. « La fin d'année est une période particulièrement difficile pour les résidents », confie l'éducateur. « Le sentiment d'isolement est bien souvent décuplé. Chez ceux qui ont connu des Noël heureux en famille, cela éveille les souvenirs d'une autre vie. Pour les autres, cela met en exergue leur solitude. On voulait permettre à tous de trouver un peu d'esprit de fête. On a récolté à droite et à gauche des lots pour qu'ils aient droit eux aussi à leur cadeau de Noël. »
Le CHRS de Betting est niché au bout d'un chemin étroit, à l'écart de la ville. La structure, qui compte 26 places, accueille exclusivement des hommes, orientés ici par le 115, la plateforme d'urgence sociale. « Ce sont tous des sans-abri, exclus de la société, qui vivent en marge », décrit Enrico Petrosino, chef de service. « Certains sont à la rue depuis des années, d'autres depuis peu de temps. Certains souffrent d'addiction à l'alcool ou à des drogues. On ne connaît pas toujours leur parcours, on ne sait pas comment ils se sont retrouvés à la rue. Ils nous racontent leur histoire s'ils le veulent. On essaye parfois d'imaginer leur vie d'avant, quand ils étaient actifs, mariés, pères de famille. »
Ils débarquent ici avec le peu d'affaires qu'ils possèdent, fourrées dans de grands sacs usés. Ils n'ont rien de plus. La rue se lit sur certains visages. Les traits marqués leur font paraître le double de leur âge. « La plupart ont entre 45 et 65 ans, le plus jeune a 21 ans », poursuit Enrico Petrosino. Au milieu de ce mois de décembre, le centre affiche complet. « L'hiver est une période sensible. Les besoins sont immenses et les places manquent. »
Le CHRS de Betting est géré par l'Union départementale des associations familiales (Udaf). En Moselle-Est, une structure similaire existe à Sarreguemines , qui accueille aussi des femmes. Sinon, il faut aller à Metz. L'objectif du centre est d'aider les résidents à regagner en autonomie, en dignité, à briser le cercle vicieux dans lequel ils sont coincés. Un travail de longue haleine pour l'équipe de professionnels en place, composée de huit travailleurs sociaux, deux maîtresses de maison, une infirmière, une psychologue et une chargée d'insertion professionnelle. « On arrive à orienter certains résidents vers des chantiers d'insertion pour leur remettre le pied à l'étrier, mais cela reste compliqué », poursuit le chef de service. « L'absence de mobilité est un frein. Les problèmes d'addiction aussi. On les aide à repasser le permis, mettre leurs papiers à jour. »
La plupart des résidents touche les minima sociaux. Au centre, chacun paye un loyer équivalent à 20 % de son revenu pour une chambre avec salle de bains, trois repas par jour, l'accès à la buanderie et aux activités. Les contrats sont renouvelés tous les six mois. Une annexe halte soins santé de six lits existe à côté, avec une équipe d'aides-soignantes qui prend en charge les plus fragiles, sous traitement pour toute sorte de maladie, addiction ou trouble psychique. En plein hiver, le réfectoire du CHRS peut être réquisitionné pour des mises à l'abri d'urgence lorsque le plan grand froid est enclenché par la préfecture. Ce n'est pas encore le cas cette année. Pour l'heure, les résidents déballent comme des cadeaux les lots gagnés au loto, faisant flotter dans l'air un agréable esprit de Noël.